Poèmes sur les petits Minous
Baudelaire : Les Chats
Les amoureux fervents et les savants austères
Aiment également, dans leur mûre saison,
Les chats puissants et doux, orgueil de la maison,
Qui comme eux sont frileux et comme eux sédentaires.
Amis de la science et de la volupté,
Ils cherchent le silence et l’horreur des ténèbres ;
L’Erèbe les eût pris pour ses coursiers funèbres,
S’ils pouvaient au servage incliner leur fierté.
Ils prennent en songeant les nobles attitudes
Des grands sphinx allongés au fond des solitudes,
Qui semblent s’endormir dans un rêve sans fin ;
Leurs reins féconds sont pleins d’étincelles magiques
Et des parcelles d’or, ainsi qu’un sable fin,
Etoilent vaguement leurs prunelles mystiques.
La Java des pussy-cats [Boris Vian]
Sur un vieux toit en zingue
Y avait des pussy-cats
Qui dansaient comme des dingues
En f'sant du bruit avec leurs pattes
Alerté, les voisingues
S'écriaient ça n'a rien d'bath
Y a d'quoi dev'nir sourdingue
On peut plus travailler ses maths
Le matou du marchand d'volailles
Une sardine en bandoulière
Avait enlacé par la taille
La chatte de la cuisinière
Chacun faisait du gringue
A la siamoise de l'épicier
C'était un vrai dancingue
A tout l'monde ils cassaient les pieds
Au bout d'une demi-plombe
Ecœurés par ce raffut
Les flics s'amènent en trombe
En faisant tourner leurs massues
Et c'est une hécatombe
Les ardoises volent en éclats
On aurait cru des bombes
Mais y avait déjà plus un chat
Réfugiés au fond d'une cave
Les pussy-cats pas dégonflés
Sirotant d'l'alcool de betterave
S'étaient remis à gambiller
Toute la nuit ils dansèrent
En usant des kilos d'savates
Pour leur anniversaire
La java des pussy-cats.